En France, l'aide alimentaire est la principale option proposée aux personnes en situation de précarité qui rencontrent des difficultés pour accéder à la nourriture. L'essentiel de l'aide s'appuie sur le Fond Européen d'Aide alimentaire, mais surtout sur des dispositifs nationaux de déduction fiscale aux entreprises et particuliers, qui encouragent les dons aux principales associations d'aide alimentaire. Plus récemment, l'aide alimentaire en France s'est alignée sur l'agenda européen, en intégrant la lutte contre le gaspillage alimentaire aux dispositifs d'aide. Ces politiques conjointes de lutte contre la précarité et le gaspillage alimentaires ont permis l'émergence de nouvelles formes de solidarité, mettant en avant les notions d'émancipation des personnes impliquées dans la cause. Des collectifs et initiatives militantes, auto-organisés, se sont multipliés. Parmi ces initiatives, certaines optent pour la récupération des aliments, comprise largement comme la collecte, la redistribution ou la consommation de produits alimentaires destinés à être jetés. Ces pratiques, encore peu étudiées en France dans leur diversité, oscillent dans leurs justifications entre lutte contre le gaspillage et aide alimentaire aux plus démunis. Cet article entend contribuer à enrichir la connaissance de ces initiatives, en interrogeant les sens dont elles sont porteuses au regard d'une conception plus démocratique des systèmes alimentaires. L'analyse se fonde sur une étude de cas menée en 2022 auprès de l'association des Jardins Agroécologiques Partagés (AJAP), engagée dans des actions citoyennes autour de la récupération alimentaire, et caractérisée par son fort ancrage territorial au sein d'un quartier populaire de Montpellier.