Le vocabulaire de la résilience, aujourd'hui omniprésent dans l'aide au développement et particulièrement concernant le pastoralisme, remplit une fonction politique. A partir de recherches conduites pendant une quinzaine d'années auprès des populations pastorales sahéliennes et d'analyse de programmes et de projets d'aide, je montrerai d' abord comment le pastoralisme est devenu aujourd'hui emblématique de la résilience. Ensuite, au-delà d'une alternative entre buzzword rhétorique et innovation, j'expliquerai en quoi la notion de résilience, appliquée dans le domaine de l'aide et du changement social, perfectionne le cadrage idéologique tenant lieu d'orientation du développement depuis les années 1980. À l'échelle locale, on peut questionner l'originalité des projets se référant à la résilience et la pertinence de cette notion dans le champ social. Plus fondamentalement, les enjeux du pastoralisme et du sahel méritent d'être nommés de manière précise par les acteurs de la recherche, par ceux de l'aide, et surtout par ceux des pays souverains : promouvoir la paix dans un contexte où le changement majeur au Sahel est la dérive des tensions foncières en conflits communautaires et en recrutements djihadistes ; intégrer les populations pastorales dans les actions d'aide d'urgence et, surtout, dans les politiques sociales et économiques. Des changements profonds sont nécessaires pour relever ces différents défis ; sans vouloir jouer avec les mots, ils justifient d'abandonner la résilience et de rechercher au contraire des transitions.