Razzia sur les produits tropicaux. C'est un grand mouvement de hausse qui, à quelques exceptions près, a emporté les marchés de produits tropicaux. Le cacao se distingue, avec un record à plus de € 11 000 la tonne sur le marché de Londres en avril 2024. Corrigé de l'inflation, on est tout près du niveau atteint en 1977. Le mystère tient moins dans l'emballement du marché après une faible récolte de la Côte d'Ivoire, premier producteur et exportateur mondial, que dans l'insensibilité de la demande au prix. Produit " doudou ", le chocolat est recherché à tout prix – littéralement. Dans le jargon du marché, on dit que le prix à un certain moment doit " détruire " la demande – c'est là son rôle. À € 11 000 la tonne, il n'a rien détruit du tout. Les acheteurs ont raccourci leur taux de couverture, tiré sur les stocks, raccourci les flux, tandis que les négociants étaient à l'affût des fèves. Le café robusta, lui aussi, régale, avec près de 70 % de hausse, suivi un peu plus tard par l'arabica puis par le caoutchouc, le thé et l'huile de palme. Il y a deux points communs sous-jacents à ce mouvement conjoint des cours des produits tropicaux vers des sommets. La demande est soutenue, bien davantage que ce qui avait été anticipé, sans doute parce qu'elle se répartit aujourd'hui à travers de multiples géographies et n'est plus dépendante d'un seul débouché : les émergents petits et grands sont un moteur puissant et résilient qui ajoute sa vigueur à celle des vieilles économies. L'autre point commun concerne l'offre : la surprise ici va dans l'autre sens, et c'est la faible résilience aux aléas climatiques et aux maladies qui fait varier les niveaux de production et d'exportation bien au-delà de ce qui était observé. La rencontre d'une offre volage et d'une demande obstinée produit, comme dans certains mariages, un résultat explosif.